Le mot du curé (15 septembre au 12 octobre) : Pâques en septembre
Une amie à qui je demandais à quoi elle passait sa nouvelle vie de retraitée, me disait : je prépare ma résurrection. Cela me paraît bien correspondre à la manière de Jésus, dans les textes de l’Evangile de Luc de ces derniers dimanches, la « montée à Jérusalem » : il prépare ceux qui le suivent à faire face au plus difficile, sa mort, comme chemin pour continuer à avancer dans une vie qui ressuscite (pour le croyant), qui traverse (pour les marins), qui débouche (pour les plombiers), bref une vie placée sous le signe du baptême.
Précédant cette curieuse rentrée, les sujets d’inquiétude se sont accentués cet été : au plus près (décès ou maladies particulièrement dramatiques et éprouvants, maladies, soucis de couple, de travail,..), et au plus loin, mais pas si loin : ici, un pays ingouvernable et fracturé, en Ukraine une guerre qui ne s’annonce pas proche de la fin, le massacre qui s’intensifie à Gaza et le ciseau-rouleau-compresseur qui accélère l’émiettement de la Cisjordanie. Je ne parle pas de la situation au Kivu, où Jean–Baptiste termine ses « vacances », ou d’autres situations moins tragiques mais très angoissantes et dangereuses, dont j’ai une certaine liste en tête, comme nous tous, mais que je vous épargnerai. Au plus loin mais pas si loin : ce qui semble lointain, du fait de la réalité des liens des membres de nos communautés, est en réalité proche pour beaucoup d’entre nous.
Or, les candidats au baptême, ou les plus jeunes, voire les enfants, découvrent la foi et veulent en vivre ; eux et d’autres, de tous âges, expriment le besoin de fortifier, structurer, former leur être croyant. Ils n’ont pas besoin que nous projetions sur eux nos vagues angoisses. Ils sont là, et la joie qu’ils souhaitent vivre avec nous, nous donner et recevoir de nous, est intense. Notre réalité est aussi faite de joies simples, de convivialité, d’encouragements, de bienveillance. Mais nous ne pouvons pourtant pas vivre ces joies simples en occultant les soubresauts de cette création en cours d’accouchement, qui « gémit encore dans les douleurs de l’enfantement » (Romains 8, 22). Le Jubilé de l’Espérance se poursuit : et le thème s’impose à nous tous comme une priorité, mais l’espérance est d’abord un parti pris fondé sur la foi.
Jésus, en route vers Jérusalem, ne dédaigne pas les joies simples, l’amitié avec les disciples, le partage de la confiance, mais ne leur raconte pas non plus d’histoires de bisounours sur les aspérités du chemin. La joie dont il témoigne jusque dans sa Passion est une signature. La joie de l’Evangile, à laquelle nous devons nous former les uns les autres, vient du mystère pascal, de l’amitié que Dieu nous propose avec son Fils qui nous permettra de traverser la mort chaque jour, mort du péché, du découragement, de l’enfermement sur soi, mort tout court. La joie est source d’action. Vivre la foi simplement, avec intensité, sans occulter les drames qui nous touchent ou nous saccagent mais sans nous y noyer, traverser la mort sans cesse, c’est le baptême, c’est Pâques. Prier, c’est y puiser.
Père Dominique Doyhénart, curé
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