Aux armes, Citoyens…

…. du Ciel.

Le carême ! Le temps du combat spirituel, de se concentrer pour déjouer un à un les pièges de l’ennemi, celui qui te suggère sans cesse des pensées à te dégoûter de la vie, de toi même, des autres et de Dieu.

L’ennemi a une ruse principale, et sa ruse contraire qui lui est identique : te faire croire qu’il existe beaucoup, qu’il est très puissant (et ainsi t’engloutir dans l’impuissance et l’ah-quoi-bonnisme) – te faire croire qu’il n’existe pas (et te faire pécher par naïveté ou présomption). Dans les deux cas, quelle que soit la manière dont tu te le représentes, il ment. Le combat spirituel, c’est remettre ton coeur à l’endroit, sans exagérer.

L’accusateur (le satan, dans une langue ancienne), il accuse Dieu et les autres de ne pas t’aimer, tes frères de communauté chrétienne de ne s’intéresser qu’à leur activité favorite, à leur groupe, à ne pas te calculer. Il te répète sans cesse que tu seras toujours un incompris, qu’ils ne changeront jamais. L’évêque est passé, chacun s’attend à ce que tout change magiquement : ça s’appelle mentalité magique. Au réveil, chacun se retrouve le même avec ses vieux os. Il faut sortir chaque jour de cette mélasse. Il n’est pas vrai que rien ne change : le changement viendra du travail de relecture et de persévérance fait ensemble. La nouveauté vraie et bonne (celle qui ne nait pas d’un projet technocratique qui écrase tout sur son passage) vient de la relecture patiente et de la persévérance.

Il t’accuse à propos de tes engagements solidaires, en te concentrant sur ta personne : tu n’y arriveras jamais, tu es trop nul, tes intentions ne sont pas pures. En te concentrant sur ce qui empêche de vivre, il te fait perdre le fil, la mémoire de ceux pour qui tu te bats. Il te fait croire que tu devrais être le sauveur du monde, assurer tout le temps. Il te distrait de l’essentiel : assumer tes engagements en travaillant modestement avec d’autres, à plusieurs, au service d’autres, simplement poursuivre les objectifs définis ensemble.

Cherche d’abord le Royaume de Dieu et sa justice, le reste viendra par surcroît en son temps.

Il jette aussi le doute sur ta prière, sa sincérité. Selon les jours, il t’enfonce dans l’idée que tu n’aimes pas vraiment Dieu, ou que Dieu ne t’aime pas vraiment. Là aussi il faut débrouiller les fils de la pelote assez vite. Oui, tu n’aimes pas vraiment Dieu, et alors ? Ce n’est pas un scoop. Dieu, ce n’est pas toi. Mais Lui, heureusement, Il en a vu d’autres, son amour est très simple, très proche, obstiné, crois seulement et remets-toi à l’endroit.

En revanche, pendant que l’ennemi t’embrouille en toi-même (en te faisant croire que tu devrais être toi-même la source d’énergie de ta propre bonté et de tes actes bons, alors que non, décidément, cette énergie, il faut la puiser en Dieu, l’Esprit en toi est capable de la puiser, c’est Son affaire), il te déconcentre, te distrait de choses plus triviales qui relèvent de ta responsabilité pour le coup : ne pas faire de mal ou le moins possible, ne pas multiplier les conduites à risque… à chacun sa liste.

Le combat spirituel, prier et se remettre sans cesse et au plus vite dans la confiance en Dieu pour laisser simplifier tout ce qui t’embrouille (Jésus est ton ami, l’Esprit est en toi, le Père ne lâche rien), et pour le reste ne mets pas les doigts dans les prises, regarde dans ton rétro avant de faire une marche arrière, évite de dépenser plus que tu n’as ou de te laisser influencer par qui te veut du mal même sous des dehors agréables… bref ne fais pas le malin.

Père Dominique Doyhénart, curé